A la recherche d'une racine

Kipepeo retrouvait le rythme familier de ses enjambées longues et souples. Elle pensait aux heures parcourues dans des forêts lointaines et sur les routes des Royaumes, toujours poursuivie par quelque rêve impossible : ne plus porter le poids de ce don spontanné d'ensorceleuse, arriver un jour à en être fière !

Sortant de ses rêveries, elle se tourna vers son compagnon :

- Il y a longtemps que vous vivez à Marsembre ? s'enquit-elle avec curiosité

Tharivor marchait la tête haute à la droite de Kipepeo.

- Je vis à Marsembre depuis ma plus tendre enfance, en tout cas aussi loin que je me souvienne.

Des cris s'élevèrent au loin vers le nord (donc pour situer: la foret est à l'est et les cris au nord donc sur la gauche).

- Que faisons nous? Allons nous voir ce qu'il se passe?

Kipepeo s'arrêta et tourna la tête en direction des cris... Elle n'était pas sûre de vouloir aller aider. Si elle était encore vivante aujourd'hui c'est justement qu'elle ne se mêlait que très rarement des affaires des autres. Mais quelque chose lui disait que Tharivor n'était pas de la même trempe. Elle acquiessa :

- Oui, allons-y et avec prudence et discrétion...si vous voulez bien.

Ensemble ils se dirigèrent vers la source des cris

La terrible scène s'imprima en une fraction de seconde dans l'esprit de Kipepeo. Sans plus réfléchir d'avantage, elle arma son arc et jetant un oeil vers son compagnon lui souffla à voix basse :

- Allons y, prestement mais sans bruit ! Gardons l'avantage de la surprise.

Son visage était ferme et résolu. Elle se sentit envahie d'une colère froide.

Sur ce elle avança vers le groupe aussi rapidement et discrètement que possible.

Kipepeo berca la jeune fille en lui caressant les cheveux doucement et lui mumurant des mots doux, tentant de la rassurer. Des larmes picotèrent aux yeux de Kipepeo : la pensée des doux bras de sa mère revint à son esprit et là, en ce moment, elle aspirait à retrouver sa voix et ses yeux, son odeur de violettes sauvage. Une autre image se superposa à son esprit : cet homme qui l'avait tué, plantant sa hache dans sa poitrine, détruisant en un coup tout son monde et son avenir. Elle frissonna un instant et détacha la jeune fille en pleurs :

- Allons, sèche tes larmes fit-elle un peu rudement d'abord, pour ensuite lui sourire gentimment.

La petite tenta de sécher ses larmes puis, après un court moment sans pleurs elle repartit de plus belle en disant.

- Ils ont tué mes paren...en...en...ents.

Pendant que Kipepeo tentait de calmer la petite son compagnon de route revins en faisant un signe "non" de la tête.

Kipepeo savait que rien ne pourrait combler le vide ressentit à la perte de ses parents. Aucune parole, aucun geste... Sa détermination prenant le dessus, elle regarda Tharivor revenir de son inspection :

- Tu crois qu'on a le temps de leur faire une sépulture décente ? fit-elle avec dans la voix une note rauque, dénonçant son trouble intérieur. Le tutoiement était venu tout naturellement... néanmoins, elle se mordit les lèvres, espérant n'avoir pas choqué Tharivor qu'elle commença à apprécier...

Puis, il va falloir l'emmener avec eux. Quelques questions s'imposaient aussi. Kipepeo redoutait ce moment pourtant nécessaire : savoir qui cette jeune fille était, et d'où elle venait.

- On en a tout à fait le temps si ... tu trouve cela nécessaire.

Tharivor se servit alors de sa hache pour commencer à creuser. La jeune fille se mit à genou devant les corps de ses parents et continua à pleurer.

Aidant Tharivor du mieux qu'elle put dégageant la terre avec ses mains, ils eurent la satisfaction de pouvoir enterrer les parents de la jeune fille. Se redressant avec efforts, Kipepeo et Tharivor eurent un moment de silence, offrant leur prières aux dieux. Puis, Kipepeo saisit doucement les épaules de la jeune fille pour l'éloigner...

- Allons-y fit-elle d'une voix douce. Elle regardait Tharivor et elle lui faisait signe qu'il était temps de s'éloigner. Ils prendraient les différents renseignements et les décisions un peu plus loin, hors de vue de cette désolante scène.

S'éloignant du lieu du massacre et se rapprochant de la forêt, le trio s'avançait en silence. Ce fut la jeune fille qui fut la première à briser ce silence:

- Où va-t'on?

Entièrement perdue dans ses pensées Kipepeo n'avait pas vraiment remarqué qu'ils étaient maintenant plus proche de la forêt.

- C'est vrai. On va faire une petite pause. Kipepeo se choisit un petit coin d'herbe fraîche et odorante et invita la jeune fille et Tharivor à s'assoir à ses côtes.

- D'abord, commença-t-elle en souriant, dis-moi ton nom et d'où tu viens ?

Après s'être assise, la jeune fille répondit aux questions de Kipepeo pendant que Tharivor se mettait à son aise.

- Je me nomme Drusilia Ilphukiir et je viens d'une petite ville à proximité de Daerlune, au delà du grand marais en Sembie.

Tharivor se leva alors et commença à ôter son armure. ne fois cela fait il se mit torse nu et prépara un feu en disant:

- J'espère que vous avez faim car je vais vous concoctez un bon plat.

- Heureuse rencontre en vérité Drusilia, fit Kipepeo d'un air à la fois doux et grave les dieux nous ont mis sur le chemin pour que tu ailles la vie sauve ! Moi je suis Kipepeo, originaire de l'Algarond, et voici Tharivor de Masembre... Jettant un oeil à son compagnon de voyage, Kipepeo s'arrêta un instant à la vue de ce torse finement musclé luisant doucement dans le soleil de l'après-midi.

- Moi je meurs de faim lança-t-elle à l'adresse de Tharivor d'une drôle de petite voix. Elle baissa les yeux en proie à un léger trouble qu'elle ne parvint pas à définir exactement, et se reprit puis se tournant vers la jeune fille lui raconta le but de leur voyage.

- J'aimerais continuer notre mission, bien qu'elle présente des dangers auxquels je ne voudrais pas t'exposer... Qu'en penses-tu Tharivor ? Levant ses yeux dorés vers lui, le trouble était à nouveau présent, mais elle parvint à ne pas rougir et à soutenir son regard.

La jeune fille écoutait sagement, et Tharivor se tourna vers Kipepeo pour lui répondre.

- Elle sera de toute façon plus en sécurité avec nous que seule avec cette bande de gobelins dans les environs.

La jeune Drusilia réagit alors:

- Je saurais me rendre utile vous verrez!

Tharivor prit dans son sac une espèce de casserole dans laquelle il avait déjà préparer visiblement quelque nourriture.

- Ce sera prêt dans environ cinq minutes.